1.07.2023

A propos d'un " colonialisme spirituel"


 

Sex Tourism With Statues

Buddhist Art of Tibet: In Milarepa’s Footsteps is a cringe-worthy display of “spiritual colonialism.”
 Et une dose supplémentaire, au cas où.
Par les mêmes qui pratiquent la méditation et le yoga ( quand il était tendance) sans se poser de questions sur la capacité de trivialisation et de dé-spiritualisation de tout ce qui entre dans la gueule ouverte du post-capitalisme et de l'utilitarisme.
Evidemment si à travers cette chasse aux sorcières des colonisateurs se condamne l'hyper-tourisme et tout ce qu'il véhicule de massification abrutissante de tous et toutes ( asiatiques y compris), on n'a rien à redire.
Mais ce qui est sous-tendu, dans l'incapacité du progressisme à intégrer la nuance et à tout noyer de la complexité dans une glue bienveillante essentialiste, c'est l'impossible de chacun à apprécier, respecter, aimer, s'incliner face à l'art, religieux ou non, d'autres cultures que la sienne.
C'est aussi le constat des floraisons toutes lucratives d' "essais" pseudo intellectuels et majoritairement issus du nouveau matriarcat, acceptés sur le plan théorique comme des bréviaires du bon droit et complètement hors des clous de ce qu'on nomm(ait) la recherche scientifique.
Dans cette veine mortifère on place l'idée que seules les femmes peuvent parler des femmes, que seuls les noirs peuvent parler des noirs, etc. éliminant de l'horizon que cette amputation de la capacité à intégrer, assumer, se projeter de tout art ne peut pas s'appuyer sur des œuvres qui se produisent "en tant que".
Ecrire "en tant que" femme, par exemple est l'aveu de l'échec complet de tout ce qui qualifie la spécificité l'art et ce qu'il recouvre de dimension intégrative des liens interhumains dans leurs caractéristiques religieuses, socio-historiques et leurs différences ontogénétiques n'existant qu'à faire système pour remplir sa fonction.

Si cette production s'effectue "en tant que", elle élimine toute ouverture vers l'imaginaire de l'espèce une fois que son message est offert au public, qui peut après tout lui aussi, n'être public qu'"en tant que", chaque catégorie baignant dans son propre jus militant et, bien sûr, résiliant, apaisée dans les postures victimaires et ségrégatives qui qualifient sa raison d'être et certaine de n'entendre ou de ne voir que le message qu'elle attendait et dont elle maîtrise parfaitement le contenu, à la fois dans la forme et dans le fond.
Le paradoxe, mais on n'est pas à une aberration prêt, c'est de trouver une telle rigidité catégorielle érigée en dogme dans un contexte où les frontières et les définitions des caractéristiques de la "nature humaine" ne sont plus que des références à la volonté de chacun de les éliminer.
Un artiste qui ne peut créer qu'"en tant que" se condamne et nous condamne à une sorte de plainte sans fin sur tout ce qu'il n'est pas et ne peut envisager autrement qu'en le décrivant comme persécuteur. Cette forme de sectarisation-sectorisation des identités les enchaîne à un qualificatif qui est supposé le dire tout entier et ce faisant, éliminer complètement du champ de ses investigations, de ses recherches et de ses risques, tout ce qui le lie, le relie à tous en tant que, simplement, êtres humains.
A titre d'illustration de ce joug créatif imposé par le progressisme, Le grand Steve Mc Queen aurait-il réalisé un chef d'œuvre comme "Hunger " si il avait travaillé "en tant que noir" ? Et dans la même logique de l'absurde et de la castration, doit-on lui reprocher d'avoir fait de l'appropriation culturelle en s'emparant, oh combien brillamment, des luttes pour l'autonomie irlandaise ?
Dans la logique de cette insanité sur les statues bouddhistes, pourquoi ne pas interdire à tout touriste la possibilité de s'émerveiller face aux richesses antiques sous le prétexte d'une colonisation de l'art dans le temps ?
L'art a nécessairement une fonction métaphysique et sociale qui donne à l'artiste et à ses réceptacles la mission d'englober tout ce qui peut être de l'ordre d'une humanité affrontant ses contradictions et ses impasses à tel moment de son parcours civilisationnel.
La qualité d'un artiste est d'éclairer la destinée humaine dans les multiples facettes de sa tragédie. EG
 
 
 
 
 
 
 

Petit conte amiénois Dixième partie