Joan Semmel.
Les peintresses ont une capacité, un talent particulier à exhiber dans
sa force et son mystère, comme dans sa violence latente, le corps sexué,
à rendre le corps sexué omniprésent (parce qu'il l'est mais qu'il faut
aller le prendre sous un fatras de voiles divers). Cette organicisme
désireux et énergique, sans pudeur, c'est une spécificité femelle. C'est
l'inverse de la pornographie même si ça parle des mêmes choses. C'est
peut-être à cause du savoir que les femmes ont sur ce corps-là, que les
hommes s'évertuent à chercher ou à nier en croyant pouvoir le réduire à
leur queue, qu'elles ont tant de problèmes. Parce qu'un savoir comme
celui-ci, il faut en faire quelque chose et ce qu'on en fait ne peut
être que dérangeant.EG
" Le corps est un instrument sensuel, il est sensuel que vous ayez 10, 20, 75 ans " JS.
C'est de ce corps-là, uniquement tendu vers sa propre réceptivité et le plaisir qu'il en reçoit puis apprend à chercher dont il est question dès que la mise en cerceuil des femmes s'apaise un peu. De ce corps dont elles ont gardé le savoir intact, dont elles cultivent jour après jour à leur insu, la mémoire, et qui reste, avec les aléas des cultures où elles se déplacent et qui dovent les tenir, un refoulé social et une forme d'envie et de terreur chez l'homme. La mémoire enfouie d'un paradis, une tentation omniprésente de se laisser absorber par ce fruit dangereux, la capacité à n'être que l'intelligence mordante d'une peau et les sens qui la nourrissent. EG