9.13.2020

L'exécution du sens commun



Pas une journée où, lisant les nouvelles du monde et des gens visibles qui le gouvernent, que filtrent les agences de presse et qui sont ensuite copiées-collées et lessivées par les organes de presse des divers services de la propagande, où l'on ne se disent que ça va bien un jour redevenir "normal ", que dans quelques temps la "raison" , la "common decency" d'Orwell, va reprendre ses droits et que nous allons enfin ne plus avoir à nous éclater régulièrement le front sur le mur, pour décompresser la sensation de rage et de perplexité face à la Dinguerie universalisée.
Mais ça ne marchera pas comme ça, ça ne reviendra pas vers les rives de l'entendement non prescripteur, ni vers celles de l'ouverture d'esprit et de la fragilité frétillante des hypothèses. La façon de se poser au regard de quelque chose d'évanescent et d'exigeant comme la "vérité" a complètement glissé vers un nivellement travaillé au corps des valeurs à la fois individuelles et collectives, les secondes étant de plus en plus des mots d'ordre imposés dans un esprit de réforme des âmes et des comportements pour le bien du progrès général de la modernité.
Chacun est, à des degrés divers, adhérant ou luttant, embarqué dans ce mode de pensée, cette mode de pensée qui aspire, comme le délire organisé et la vision du monde d'un psychotique vous inclut et vous modèle sans que vous puissiez mettre entre lui et vous les distances du symbolique comme terre commune partageable.
Ce qui aggrave cette sensation d'étrangeté et d'inéluctabilité et rend ce glissement vertigineux, c'est son équipement de multiples nouveaux champs lexicaux, tous auréolés des validations scientistes de concepts que des experts auraient enfin "découverts" et qui nous rapprocheraient de cette même vérité mais qui lui confèrent la sensation si pénible de n'être plus qu'une enveloppe extensible à merci mais sans contenu.
La mainmise sur les seuls outils dont nous disposions qui puissent nous permettre de nous positionner, de nous opposer a progressivement stérilisé et normé tout rapport à l'autre, à soi, au monde, en l'encadrant de formules standards auxquelles chacun ne peut plus que se coller pour se définir, choisissant dans cette sorte de buffet imposé ce qui semble le dire au mieux mais incapable de sentir que sous cette enveloppe identitaire réduite à une ou quelques épithètes ne reste plus qu'un grand vide.
C'est là que l'espoir de voir revenir l'entendement et sa logique dialectique n'a plus lieu d'être.
Les processus de pensée de chacun devenu créature en suspens permanent étant préétablis à travers un champ sémantique extrêmement réduit, mais incontournable parce que seul à être validé par l'esprit du temps, leurs finalités et leurs modes contingentés d'une façon normalisée déterminent son appartenance au courant, mettant en lumière ses compétences intégrative ou le rejetant sans espoir de salut dans les limbes du démodé.
Il ne reste tout simplement plus aucun espace psychique exprimable autrement que dans le pathos, lui aussi entièrement encadré par le discours scientiste, pour se construire et être à soi ailleurs que dans les catégories du Discours unique.
C'est une forme d’absorption complète de l'individu par l'esprit de son temps, bordée seulement, comme par des garde-fous, au sens propre, par les jugements péremptoires permanents de ses pairs devenus procureurs sur tous les dires et les comportements qui ne soient pas acceptables.
Supervisant cette folie collective incurable, les vieilles valeurs de l'exercice du Pouvoir peuvent continuer à exhiber leur absence de limites, leur inconséquence, les paradoxes actifs à longueur de temps dans leurs choix ruinant les reliquats de rationalité collective dans une impunité totale.
Les exigences de la Raison ont fait place au laxisme des narcissismes, égarés sous le joug de l'obligation d'accès à une même liberté prédéfinie pour tous. La logique a déserté la morale. EG







Ce qui ne nous tue pas ... N°2