11.20.2020

Sweet lullabies

  


Sweet lullabies.

Dans notre plouto-démocratie, il est encore un peu délicat de rentrer ouvertement dans le gras des foules, le niveau de terreur n'est pas encore atteint qui réduirait complètement lambdas et presse d'investigation au silence sous peine de passer par les armes par tombereaux entiers. C'est une des raisons pour lesquelles le fait, largement utilisé, de se référer aux hommes politiques agissant, à leurs sbires et à leurs pontes, comme aux forces dites de l'ordre, en les nommant bêtement "fascistes" est une erreur de tir. Les méthodes, le contexte historique et surtout les mentalités qui font tout de l'histoire en sourdine sont mus par des forces actives différentes de celles qui présidèrent à la montée des vagues brunes et leur poser ainsi une étiquette sur ce qu'elles laissent par instant apparaître est une façon de passer complètement à côté de ce qui pourrait les rendre accessibles et donc, au moins partiellement, compréhensibles et maîtrisables. 

On peut par exemple, en ce moment, entr'apercevoir une forme de "courant", évidemment induit par des individus qui n'ont pas la Une des médias dont la masse se sustente mais qui donnent le "La" de ce qui peut être une étape vers  l'élargissement  de la norme dans ce qui est accepté, tolérable, admis, digéré par l'Ensemble, offrant à anticiper une forme de totalitarisme re-né de ses cendres et moins barbare en surface que ceux que nous avons connus. Mettre en cause, ici, la loi de de 1881 sur la liberté de la presse, et en même temps, entendre des voix qui outre-Atlantique soupirent sur l'obsolescence du Premier amendement de la Constitution, faisant dans les deux cas, à coups d'allusions à une spécificité de la liberté selon tel ou tel moment de l'histoire des démocraties en rendant  accessible l'idée que cette même liberté puisse être "aménageable", une référence à ce que ces piliers symboliques peuvent avoir de "démodé" , peut n'être qu'un peu d'eau au moulin de l'uniformisation de la pensée globale dont la puissance est d'autant plus destructrice qu'elle s'imprègne dans les âmes sans douleur et sans violence apparente, avec leur bénédiction, leur appétit insatiable de maîtrise et leur volonté de s'améliorer.

Bien sûr, ça n'est pas simple. Il faut aussi de-ci de-là y aller à coup de boutoir en liquidant de la surface des écrans quelques voix un peu rauques. Mais, comme pour un évènement à dimension supposée "historique" bien connu et subi par des milliards d'individus avec une passivité critique remarquable, il suffit de dire, haut et fort, de répéter aussi, inlassablement, que c'est "pour leur bien", pour "les protéger" pour que, retombant dans une enfance dont personne ne souhaite vraiment jamais se débarrasser, tous se précipitent dans les jupes maternantes du Pouvoir-parlant et y trouve le réconfort face à la douleur d'exister.

Le "fascisme" des mères est bien plus venimeux, plus insidieux, plus corrupteur de l'esprit que celui, lourd et brutal des pères. Le fascisme des mères vous inclue, vous absorbe dans les rais de sa bienveillance, quand celui des Pères sépare le bon grain de l'ivraie et, en localisant chacune des parties, vous intime de choisir votre camp .
Une main douce qui vous dit que vous taire et n'écouter que sa voix vous berçant ne sont exigés que pour votre bien est plus pernicieuse qu'un coup de poing dans le pif parce que cette main, quand sa chaleur s'éloigne, on la demande, on la veut, on souhaite qu'elle vienne s'imposer à notre doute et à notre solitude et qu'au chaud sous sa paume, on puisse enfin trouver le sommeil du juste, celui qui refuse de comprendre que personne jamais ne lui donnera sa propre liberté. EG