12.10.2020

Hemme et fomme Deuxième partie

Hemme et fomme

Première partie

Deuxième partie

Il se perçoit dans l'amalgame implicite des nouvelles catégories de l'appartenance sexuelle et dans la flexibilité de son acronyme, postulant une uniformité des démarches et des identités, une volonté de faire bloc, de se démarquer, par le seul fait de se voir figurer ainsi derrière la majuscule de son groupe de référence, d'un groupe imaginairement supposé, lui, homogène et créé par un rapport monolithique de chacun de ses membres à son appartenance sexuelle. Cette extensibilité large ouverte dans le + qui tente de la clore tout en révélant, peut-être à son insu, dans la volonté presque obsessionnelle "d'inclure" tout en "différenciant", l'illusion de cet émiettement presque à l'infini des catégories comme inhérent à la fuite en avant dans la fluidité, elle aussi sans borne, des appartenances.

Les pôles que représentent les entités sexuelles essentielles sont également des garde-fous contre ce danger de l'émiettement à l'infini des identités, sont des boussoles ou des phares, encore une fois, non dans lesquelles chacun est tenu de se placer mais par rapport auxquelles s'effectue son positionnement dans le travail de devenir du sujet humain.

Les divers courants des postures culturelles progressistes contemporaines à l'égard de ce travail donnent à croire qu'il n'aurait comme moteur et comme base que la version sociale et ses représentations de ce qu'est "une" femme et de ce qu'est "un" homme, négligeant l'essence ontologique et la nature d'entité psychique constitutive de leur existence comme piliers pour l'humain  de tout processus d'appartenance et d'entendement du monde.

D'une certaine façon, sous-entendue à ces modèles comportementaux contre lesquels les mouvements dits "de libération" se placent, est postulée une possible éradication non de ces rôles seuls mais de la différence première elle-même. On retrouve par exemple cette dynamique de déni dans les postures transsexuelles et dans leur justification militante. Il est d'ailleurs probable que se sache inconsciemment l'action implicite de la supercherie, le "je sais bien mais quand même" à l'oeuvre et que la sensibilité ou plutôt la susceptibilité dans la posture victimaire et la plainte manifestées d'une façon systématique et quasi institutionnalisée pour défendre ou imposer cette reconfiguration de la réalité soit un des signes de ce savoir latent occulté.

Tout cela, donc, travaille, et intensément, tout cela heurte aussi, jusqu'à s'y fondre, les traits caractéristiques de notre époque post-moderne et son lent et douloureux avènement de l'Individu-point, de la créature auto-générée, améliorable à merci, gérée et gérante de tout ce qui la touche, intérieur comme extérieur, effleure aussi les fantasmes-réalités de la transhumanisation et des velléités d'action volontaire sur tout ce qui peut caractériser l'humain et sa faille ontogénique, vie, mort, sexe, tout soumis aux capacités sans bords de la science et de ses prolongements médico-technologiques.

Mais là où peuvent s'émettre quelques réserves sur la valeur des changements impliqués dans ce grand remue-ménage, c'est dans le cercle qui se boucle lui-même des appartenances et dans la condamnation à devoir, pour le briser, n'avoir recours qu'aux enveloppes de l'apparence.

Le mirage est là, devenu lettre, du fait que dans la quête d'une virilité comme d'une féminité enfin débarrassées de leur nature catégorielle immuable et originelle, on soit condamné à ne plus porter que les costumes de ce qu'on a voulu éliminer.

Porter des robes, serait donc la seule issue pour s'extraire de la masculinité que d'aucuns nomment "toxique", se laisser pousser les cheveux et porter des talons hauts, seraient également la seule façon d'affirmer son appartenance sexuelle, créée à main nue donc, enracinée dans nulle part par la seule volonté d'un savoir sur la vérité de son sexe que son corps lui-même trahirait et qui serait élu comme la seule manifestation de sa propre vérité et le seul savoir sur soi, tout cela enfermé en même temps, soumis encore, dans l'impératif du costume condamné à dire cette vérité, à l'arbitraire du pouvoir de l'autre dans le regard de qui désespérément chercher la validation de ce changement d'appar(ten)ance.


 


 

Petit conte amiénois Dixième partie