5.16.2024

AU BONHEUR DES DAMES

"Rien ne me répugne comme lorsque les gens fraternisent parce que chacun voit dans l'autre sa propre bassesse." Milan Kundera La plaisanterie 
 
Les évènements, manifestations diverses,  affichent  avec de moins en moins d’ambiguïté l'emprise des flux idéologiques sur leur esthétique et leur contenu.
Ces femmes debout côte à côte  sur la prestigieuse scène dans l'antre de l'élitisme de la fiction, parées des atours luxueux de l'exception et des rougeurs diffuses de l'addiction au succès le montrent sans avoir à le dire : le but extrême du néoféminisme devenu partie intégrante de l' idéologie d'état est atteint : c'est la prise de pouvoir convoité comme absolu et, en traîne, la disparition du Mâle.
Et toutes les manœuvres explicites d'accusation, de condamnation,  de plaintes, de déclarations, de censure et d'effacement, touchant un à un des hommes parmi les plus reconnus et considérés, cherchant, par l'action de la moissonneuse batteuse médiatique toujours avide de chair tuméfiée, à les priver, avant toute suite pénale et tout jugement, dans un même temps de la possibilité d'exhiber leur créativité et de la reconnaissance par leur public, mis lui aussi au ban, de leur talent. 
Il est révélateur  de l'esprit revanchard et vengeur de ce mouvement de constater que ce grand nettoyage éthique s'opère également sur ceux, depuis longtemps disparus mais demeurant marquants dans l'histoire culturelle, en les "dénonçant" pour des exactions postulées ou des comportements insupportables ayant eu lieu de leur vivant et en les extrayant de leurs tombes par souci de justice pour les accuser et déblatérer sur leurs travers  privés sans que, bien sûr, ils ne puissent jamais répondre.
Ce recours à des attaques exercées sur des morts montre que ce n'est pas une réponse qui est attendue de toute façon, la dynamique pour se maintenir nécessite une béance qu'une réponse, judiciaire en particulier, viendrait clore.
Sous l'a-priori semblant s'imposer comme un consensus arraché de force à l'opinion publique, d'une "vérité" émise comme par essence par "les femmes",  érigées en éternel "groupe minoritaire" et fonctionnant comme fonctionne la rumeur, c'est à dire sans besoin de preuve, de contexte ni, pour effectuer sa mission insalubre, de garde-fou juridique,  le libre cours est laissé au goût pour la passion morbide du lynchage médiatique et a progressivement concouru à  l'ordre imposé de la femelle victime par nature, ne pouvant mettre en forme, évoquer que cette victimisation et le corps qui la tient dont elle semble ne pas pouvoir jamais sortir autrement que comme frustrée, amoindrie, plaintive, mais qui, par la revendication de cette victimisation même, la rend au moins fantasmatiquement, toute-puissante. 
Victoire parfaitement incarnée, sous les suffocations de l'émotion et les frissons de la sororité,  le long de cette rangée de beautés fatales enfin débarrassées des mains au cul qui leur barraient, depuis Adam et Eve, fantasmatiquement la route vers le pouvoir.
"Des femmes puissantes" : l'action du langage, toujours mettant à jour, comme si de rien n'était, les enjeux inconscients, s' éclaire comme par magie dans l'attribution de cet adjectif.
De même le détail assez troublant qui affiche les  quelques centaines de signataires du même pamphlet contre la gente masculine dans la rubrique mondaine, toutes uniquement en ...pantalon.
Pour ne pas mentionner le ricanement de l'égérie sur le retour la plus cotée jusqu'à la prochaine ; nouvellement hissée consultante informée auprès des sénateurs, réalisatrice en quête d'audimat faisant un retour parfaitement chronométré en terme de promotion sur la chaîne d'état progressiste, que tous étaient ou presque sur le point d'oublier et soudain élevée par son statut de victime, au rang des stars des justes-luttes  (SJL) sous les manipulations de quelque réseau obscur de bienfaisance et qui, face aux demandes de ses pairs mâles avides de comprendre et impatients de s'adapter, ne peut que reléguer leur bonne volonté, calculatrice et perverse évidemment, d'un revers de sa petite main devenue, dès les feux de la rampe à nouveau effleurés, dictatoriale.
On voudrait trahir les desseins cachés mais actifs sous la cause qu'on ne s'y prendrait pas autrement. 
Un autre point de butée pour tout rongeur critique, repérable jusque dans la presse anglo-saxonne qui se fait une gorge chaude des déboires de la France, nation de l’Érotisme institutionnalisé aux yeux de la perfide Albion, avec ses monstres sacrés, c'est l'évocation, au même niveau de tort et de nécessité de punition, des mâles pédophiles  intersexes et littérateurs à leurs heures ou amateurs revendiqués de jeunes filles en fleur, avec ce même cri du cœur de l'oppressée majeure. La réalisatrice sur le retour elle-même, devenue la Jeanne d'Arc du combat féministe, ne se réfère-t-elle pas dans sa plainte à des abus infligés lors de sa minorité ?
Étonnante chose que d'amalgamer des combats de divers ordres et de divers statuts juridiques, le droit de cuissage institué de certains réalisateurs ou producteurs et le goût pénalement interdit pour la chair trop fraîche, qu'elle soit d'ailleurs celle de gentils garçons ou de gentilles filles.
Qu'est-ce qui, encore ici,  se montre de ce que ce mouvement tait dans ce mélange dans le fantasme de l'homme prédateur et séducteur à punir et de l'homme pédolâtre et incestueux ?
Ces femmes du monde,  femmes-enfants, ne pensent plus même à s'accaparer l'objet du désir, elles ont assigné son porteur éternel à le cacher comme une arme prohibée dans les soutes de la honte et de l’opprobre culturelle et sociale, elles ont, comme son absence sur cette scène de l'exhibition le prouve, pleinement réussi, sans avoir eu recours à la loi, à l'éliminer, lui et ses talents, lui et sa créativité, de la cause de la justice radicale dont elles sont la voix maintenant unique et crainte.
La nature des accusations reste toujours suffisamment générale, muette sur les motivations  latentes du parti plaignant et aisément calibrée par l'étiquette du slogan  pour ne pas avoir à se détailler, ni à s'expliciter, ni surtout à entrer dans le champ plus méticuleux  de la prise en compte des éventuelles réponses aux accusations.
"Des femmes puissantes" qui passent sous la loi de la présomption d'innocence pour s'enlacer les unes les autres comme les femelles victorieuses d'un combat jamais achevé et dont la plupart peut-être ne sont présentes que dans la terreur de ne pas être incluses dans le mouvement, d'être reléguées, punies dans le grand manège de la promotion et dans leur carrière par le couperet du veto médiatique pour leur indifférence à l'engagement ou pour la vétusté de leurs postures éthiques issues, toutes comme un seul homme, du patriarcat.
La virulence et le maintien de la tension comme carburants laissent songeur. La délation renait, sans apaisement possible, de ses cendres. Combat jamais terminé que celui des justes causes où n'existe qu'un seul coupable connu d'avance, proliférant celui-ci à la surface de la terre et pour le salut duquel la "femme puissante" n'a d'autre choix que de l'éliminer. 
Le malaise, lorsqu'on n'a de goût pour aucune des multiples formes des puritanismes générées par l'esprit de mode ni le besoin malsain de l'entretien amer de l'apitoiement de n'être que soi,  c'est que ce qui semble se condamner avec la litanie sus-dite, c'est l'option vitale d'être autre chose et de se dire autrement que comme des créatures intrinsèquement aliénées à leur propre sexe, enterrées dans leur propre sexe, ne pouvant évoquer ce qui le libérerait  et le ferait advenir que comme  la résolution-élimination de quelque chose d'extérieur à lui-même, avouant par là, à ne pouvoir l'évoquer que comme une sorte d'omniprésence à toujours punir ou venger, une dépendance complète à ce qu'il veut détruire et à ce à quoi justement il s'oppose avec une telle vigueur.
Que direz-vous sur vous-mêmes au monde, "femmes puissantes",   lorsque tous les hommes auront été castrés par vos soins ? Quelle sera votre source d'inspiration une fois extraites les facilités plutôt lâches et piètrement stylées de vos publications engagées et discours sentencieux ?
Ces incantations dont les bréviaires ont été importés tous et mot pour mot, concept par concept, d'Outre-Atlantique sont une forme de mouvement rotatif,  centrifuge et fermé sur lui-même, où n'est présenté comme garant de l'existence de l'individu que la dimension sexuée de son être-au-monde et où celle-ci est non seulement première mais d'une façon tragique, seule à le définir, tout en se trahissant simultanément comme une appartenance posant problème en soi. 
L'acte créatif ou la parole annoncée comme prise "en tant que femme", s'énonce, en dépit de l'évidence même, comme un préalable à mentionner incontournable et, paradoxalement, comme un préalable qui se doit d'être précisé comme si cette  sorte de mise au point pour l'auditeur ou le spectateur devait servir de prémisses et de caution à cet acte créatif ou à cette parole quelle qu'en soit la qualité esthétique ou formelle.
"Parler de son sexe" : "de" comme le lieu d'origine, au sens de "à partir" de son sexe,  et "de" au sens de "à propos de" son sexe  pour croire découvrir une sorte de savoir absolu enfoui et soudain révélé et le brandir comme unique aune de sollicitation à l'échange sous forme de "mode d'emploi"  de la féminité, tout en punissant drastiquement les concupiscences à son égard, autrement dit ne pas savoir qu'en faire puisqu'il s'agirait apparemment d'en faire quelque chose à conquérir qui n'existerait pas encore  et qu'aucune autre femme sur des millions d'années n'aurait su exprimer même si, à part cette scansion épuisante de la poursuite inlassable "en tant que femme" de la "fin du patriarcat", on ne sait pas bien quoi.
Comme dans toute réponse promue au rang de slogan doctrinal, comme dans toute généralisation abusive et radicale et dans tout enclos  idéologique envahissant les discours et la scène publics, on est enclin à chercher sous l'ardeur de l'engagement quels peuvent être le bénéfice et la motion inspirante.
C'est évident qu'ils sont tous deux difficiles à percevoir tant le niveau des cris d'outrage et des gémissements des victimes abusées, manipulées, emplissent l'espace acoustique et nous forcent à baisser la tête vers le sol, confus et effrayés par la résistance, incompréhensible devant tant de libération, des conceptions réactionnaires sur l'égalité des sexes.
Une hypothèse face à la diffusion chronique de ces aveux destructeurs de réputation, hypothèse osée et dépassée cela va sans dire puisqu'elle s'inscrit dans le modèle de lecture que les découvertes de la psychanalyse et les travaux de sociologues, d'anthropologues et de philosophes, parfois sans oser la nommer, mettent en avant, comme dans l'image nietzschéenne de "la joie mauvaise", est la dimension de déclencheur fondamental de l'Envie dans le liant ou déliant social.
Elle est ce qui a pris feu sous l'étincelle de dénonciations de faits réels,  de témoignages de marchandisation, d'abus et de violences répréhensibles, encore une fois au sein du gotha de la rage narcissique et des travers structuraux de l'industrie du spectacle, et a été ensuite lâché  sur tous les continents ou presque jusqu'à se disséminer pour en venir à qualifier l'ensemble des postures mâles à l'égard de la femelle comme système séculaire d'oppression.
Cette propagation est devenue possible en érigeant soudain l'usage de la dénonciation sans preuve comme une arme et un outil promotionnel pour toutes celles qui cherchaient désespérément à se faire une place à n'importe quel prix dans la fosse aux lions, et aux lionnes, et que l'ingratitude et la prolifération de la concurrence dans le milieu du showbiz avait reléguées.
De la nécessité fantasmatique de coucher, on est passé à la nécessité de dénoncer les tentatives de couchage pour réussir.
Étayée dans sa dynamique par la griserie de tous les possibles offerts par l'ère post-moderne, par l'effondrement sous-jacent de l'autorité dans tous les champs socio-politiques et par la relégation du père et de sa fonction comme porteur privé de cette autorité, c'est un peu comme si dans cette possibilité d'expression soudain sans frein, ouverte sur une sorte d' infini renouvelable à merci de la plainte, offerte et encouragée, le néoféminisme avait libéré, plus que les femmes qu'il est supposé promouvoir, une des composantes métapsychologiques de la genèse psychique à laquelle, peut-être à cause de la force de l'Envie et de sa destructivité ravageuse, impossible à assumer, on ne peut se référer, avec de temps à autre cependant, la percée de la "Schadenfreude" évoquée comme du bout des lèvres et exclusivement dans les publications médiatiques de langue anglaise.
Quand, négligeant de mentionner la nature de la demande initiale, c'est à dire les buts des plaignantes qui étaient à l'origine de la rencontre ou de l'échange ayant dérapé dans l'abus sexuel, les accusations pleuvent, si nombreuses et si focalisées dans un cercle somme toute extrêmement mondain et restreint, sur un certain type de femmes ayant ou ayant eu toutes des velléités de visibilité et s'étant vues, malgré leur bonne volonté ou sans elle, négligées par l'appareil, perdre un peu de leur prestige ou de leur notoriété ou  tout bonnement refuser l'accès aux diverses Mecques  de la visibilité par l'Homme gestionnaire de carrière ou supposé l'être, on peut palper sous le flux  et l'uniformité des attaques et l'usage systématique de la censure pour rendre l'ennemi impuissant et le bannir, la force et l'impact de ce qui, faute de pouvoir s'approprier les fruits de la créativité ou bénéficier des pouvoirs de cet ennemi ni de son soutien n'a de solution que de les détruire.
Bien sûr on touche ici ce qui hérisse les réactions scandalisées  des puristes de la répression : l'amalgame entre la personne et sa créativité et ses productions. Il semble que de laisser ainsi rejeter à la fois  dans les soutes les capacités créatrices  et donc ce qu'on nomme le talent et l'individu accusé est une manière de montrer à quel point cette envie postulée, qui ferait revenir sur le bloc inconscient du complexe de castration et sur sa façon spécifiquement féminine de le "traiter", ici, non en organisant un rapport à sa propre créativité et en nourrissant son propre talent mais en les contournant par la destruction du sexe qui "les a" faute de pouvoir les obtenir.
L'ensemble du discours néoféministe, pleinement perfusé aux rapports au manque instituant la logique morale du néolibéralisme et de l'individu consommateur, poursuivant la plénitude toujours repoussée, n'est ancré, assez paradoxalement au regard de ses antiennes, que sur de l'amoindrissement, c'est à dire sur quelque chose qui n'aurait pas été obtenu, reconnu, loué et sur la fonte de la femme, comme individu et non comme mythe, dans la seule attente d'une libération d'un joug supposé imposé par "l'homme".
La plainte porte sur une réponse jamais adéquate, évidemment jamais complète  à la question de ce qui vient se chercher pour les femmes dans cet univers spectaculaire et que  fantasmatiquement et selon les lois internes que ce dernier a suivi depuis toujours dans l'ère libérale, seuls les hommes, entendu les hommes au pouvoir dans ce même univers, seraient à même de donner comme reconnaissance, mais en négatif, par l'incorporation du statut de victime et exclusivement par lui, à travers ce qu'ils sont supposés imposer.EG

 
 


Debout les Franchouillards !!!