9.21.2024

Pure-Victime

Avant moi dans la file d'attente du pressing, il y avait un grand homme, comme on dit "bien de sa personne". Nos regards se sont échangés, c'est comme ça quand on attend. Et voilà, je n'ai pu m'empêcher de me demander si, "lui aussi" aurait pu en faire partie.
C'est ici qu'on en est, au passage, qui s'estompera inévitablement mais qui est apparu pour la première fois dans mon esprit, d'une situation apaisée, normale disons, où aucun fantasme de prédation n'intervient, à une saloperie de méfiance potentielle a priori sur ce que "les hommes" n'auraient jamais en commun avec moi.

Ce qui peut caractériser la masse, c'est la condensation de ses positions autour d'une voix majeure, celle qui "relate" et qui donne le grain à moudre de la "vérité" aux foules qui n'ont alors plus qu'à s'épancher librement et à donner libre cours à tout ce que l'humain  peut trouver de confort dans la contemplation désespérée de ses failles, dans l'agglomération de ses vices et de ses envies amères se réverbérant dans les exactions et les errements de l'autre.
 
C'est un monde dans lequel chacun de nous erre depuis l'omniprésence-potence des commentateurs d'actualité "enchaînés" par goût et par obligation carriériste à des rhétoriques qui n'ont de chance d'évoluer qu'à être recouvertes quotidiennement par ce qui les alimente de nouveauté dans l'infâme mais qui ne sont jamais le lieu de la vitale contradiction, de l'énergisant argumentaire sur les plis sombres pourtant bien connus de la réalité. 
Cette voix de masse piétine ces plis, jusqu'à, dans un élan de bienséance révolutionnaire des mœurs, les rendre invisibles, surtout jamais évocables en tant que zones d'ombre évidemment présentes dans tout tableau,  au prix du déroulement de la justice, du culte sans frein du prosélytisme du Bien préliminaire et d'une jouissance à peine cachée à pouvoir faire partie de la curée avant que tout verdict ne soit même énoncé.
Cette masse  virtuelle devenue juge et partie, nettement séparée à chaque nouvelle cause en deux blocs qui quelle que soit leur appellation : réaction/progression/gauche/ droite/conservation/libéralité, toutes désuètes  et attestant de la singulière misère du champ sémantique contemporain devenu incapable de se nommer sans avoir recours à des catégorisations propres à l'histoire qu'elle condamne, tourne sans fin autour des deux pôles d'attraction du châtiment rédempteur et du bourreau, glanant dans sa pitance les quelques éléments saumâtres qui vont alimenter son courroux et surtout, ne revenant jamais sur les lieux de son crime pour simplement admettre, se dire à voix basse à elle-même qu'elle s'est mis une fois de plus le doigt dans l’œil.
On pense évidemment à tous les croisés réducteurs de tête du vaccin, à tous les défenseurs inconditionnels des blessures de l'Ukraine, à tous les haïsseurs-par-principe de Trump, aux adorateurs de la révolution transhumaniste taisant son nom dans les grandes fêtes décadentes du régime etc. après tout, qui sait toutes ces passions peut-être incarnées dans les mêmes personnes avec leur particularité de ne jamais pouvoir simplement s'asseoir et se demander où les pousse leur ferveur vengeresse.
On a un exemple une nouvelle fois de cette unanimité beuglante avec le procès de QVS* qui étale sa présence à cours de page, jour après jour et dont quelques journaleuses, spécialisées dans Le Droit donnent de brefs témoignages à chaque sortie d'audience.
L'horrible impression que TOUS les jeux sont faits, que la vérité est là, non cachée dans l'enclos de la salle d'audience, mais dans chaque soupir de consternation, dans chaque grognement de révolte scandalisé et d'appel au rétablissement de la peine de mort, et que l'appareil de la justice n'a en fait rien à dire de mieux, de plus, n'a plus d'espace consacré à un souffle... polémique.
Les avocats de la défense conspués, comme déniés de leur raison d'être elle-même et retenus de n'utiliser comme  arguments contradictoires que les diatribes admises par la partie (civile) victimaire.
Un détail important pourtant est l'étrange constat que tous ces commentateurs présents durant les heures des audiences relatent absolument tous la même chose, au mot près, malgré la durée des débats et le nombre des intervenants, comme si une sélection de ce qui est validé était faite a priori et la seule denrée acceptable dans la justice de plateau.
Témoignage une nouvelle fois que les passe-plats eux aussi sautent sur ce tout ce qui brille, ovationnés par les néoféministes en rut qui trouvent là du pain béni pour justifier une castration générale de toute la population mâle du Vaucluse et, si ça milite bien, de la France entière.  Un procès qui fera date, une révolution de l'appareil judiciaire.
C'est un système et un discours où la victime est absolument pure,  pas "victime pure" au sens où elle serait "sans péché" mais pure-victime au sens chimique du terme, constituée du seul atome de pureté sémantique : victime, entièrement lisible, victime point-barre c'est à dire ne pouvant, de sa place de martyre, ne dire QUE la vérité et ce d'autant plus que dans ces seuls commentaires auxquels la masse peut avoir accès, jamais aucune réponse encore n'est vraiment donnée aux questions qui fâchent et qui pourraient enclencher un processus de germination du doute et qui demeureront, c'est hélas presque une évidence, à jamais sans réponse pour le public lambda.
Questions qui fâchent comme :  
Donc, ces "drogues" utilisées pour rendre la "victime" inconsciente, comme dans une anesthésie et incapable de se rappeler de quoi que ce soit, quelles étaient-elles ?
Du Témesta ? On entend du Témesta, bien. Mais le témesta doit être administré à quel dosage pour provoquer une perte totale de conscience et une complète amnésie ce à chaque fois sur le même scénario et ce pendant tant d'années ?
Et qui prescrivait au violeur.voyeur en chef les ordonnances parce que pour obtenir un tel résultat, on imagine qu'il a dû souvent resaler abondamment la soupe  de ses crises d'anxiété dans le cabinet de son médecin de famille.
Donc, alors cette pure-victime s'est retrouvée tant de fois à se réveiller sur un lit où ailleurs à poil sans se demander ce qui avait pu se passer entre le moment où elle buvait son jus d'orange et cet éveil ? Ce pendant dix ans ?
Cette pure-victime se trouve diagnostiquée avec une MST sans qu'elle se demande  qui a pu la lui transmettre ?
Cette pure-victime présente des symptômes de perte de mémoire et divers troubles associés sans pouvoir faire le lien avec ce qu'elle ingurgite ?
Cette pure-victime s'éveille avec le vagin en feu, sûrement des traces et des odeurs de sperme sans jamais se demander d'où diantre elles peuvent venir ?
Cette pure-victime, décrite par tous comme "courageuse", courageuse de quoi on l'ignore puisque seule la démarche et l'enquête de la police ont pu mettre fin à cette persécution du patriarcat et dans la mesure où ce qui lui est donné pour ce courage est une notoriété sans tache à l'international, une visibilité dont jamais elle n'aurait imaginé qu'elle lui serait accordée avec une telle générosité par tout l'appareil médiatique et une totale impunité quant à ce qu'elle pouvait ou peut avoir à jouer dans toute l'affaire de ce que le masochisme tend à lier celui qu'il enchaîne à son script.
Cette pure-victime insiste pour que des vidéos immondes soient visibles par le public haletant, pour que chacune d'entre elles soit accessible à tous,  tout ceci au nom non d'une secrète nécessité exhibitionniste mais de l'amour de la vérité et "pour faire un exemple"?  
Toutes les mentions de ce qui concernerait cette pure-victime comme assez peu pure sont immédiatement rejetées. Même si les traces de sa participation allègre à des libations somme toute assez dionysiaques  sont visibles par tous, elles ne comptent pas.
Nous sommes dans l'absolutisme néoféministe pour qui la femme n'est QUE victime : érigée comme victime, adulée comme victime, révérée comme victime, visibilisée par monts et par vaux comme victime, dans toutes les productions du marché de la cul-ture, comme si les bénéfices secondaires, les affres de la répétition, la perversité et la manipulation n'étaient jamais, jamais, jamais des qualités qu'on puisse trouver dans les cales sombres de la gente féminine.

Il va de soi que ces remarques ne dédouanent absolument pas les pénétrateurs, chacun pour des raisons qui lui sont propres, chacun mu par des motifs qui sont à éclairer DANS le contexte des audiences. Pas au fil des commentaires des justiciers amateurs baveux, nouvelles incarnations de la  "justice prolétarienne" chère aux fantasmes du Manifeste communiste.
Nous sommes dans un procès, évidemment de par le nombre d'accusés, unique, mais après tout dix ans de pratique du jeu du viol de cadavre c'est long avant de mettre au jour l'horreur.  
Mais si ce procès se voit totalement interdire toute hypothèse sur le fonctionnement du couple en tant que paire-vers et si seul l'époux, bien malade tout de même, est reconnu comme prédateur sans qu'à un seul moment la dimension pathologique de l'épouse, bien grimée dans son succès planétaire sous les accoutrements sacrificiels tant prisés de nos jours ne s'autorise à même être envisagée, c'est que nous avons dépassé l'ère judiciaire, avec le temps nécessaire, l'écoute, la polémique, le droit de chacun à ne pas être condamné avant d'être jugé, la relativisation de tout savoir impératif sur les choses humaines.
Ce qui se montre dans cette curée médiatique c'est à quel point la présence de l'inconscient  et son immense logique absurde, à être déniés, refoulés dans les fosses septiques du biocognitivisme resurgit sous forme d'absolutisme, libérant la violence pulsionnelle de tous et de chacun, son droit au lynchage qu'il pratique comme ayant-droit avec une totale bonne foi face à ce qui se joue de lui-même derrière ses hurlements de mise à mort.
Ce qu'on se dit c'est que : "Ça finit toujours par se savoir."
Donc, on attend.
 
*Qui Vous Savez






 

Décapités nous sommes.