La chasse aux vieux
N°7
Dans deux publications du Figaro, aujourd'hui, une sorte de dévotion à l'euthanasie et au réglement de compte sur les...boomers.
Avec la même rhétorique immuable de stigmatisation, et le journaliste, interrogeant Amélie Nothomb sur son dernier livre, disant : "Si on est là c'est de leur faute."
Pas "si on EN est là c'est de leur faute", qui est le discours martelé des deux côtés de l'Atlantique depuis plusieurs années, et qui semble exploser, comme par hasard, en des temps épineux pour tous où des coupables pourraient, face à la souffrance collective, servir de catharsis, mais sans qu'ici, en France, personne ne prenne la peine de voir d'où vient cette déferlante même si son appelation sonne anglo-saxonne comme TOUS les "mouvements", les irruptions idéologico-cultuelle des dernières années, les "causes" embrassées sur la bouche, que nous (Français) avons avalées comme de l'eau bénite sans une once d'esprit critique et en crachant notre venin sur toutes les figures haïes par les libéraux américains, sans, là non plus, nous demander si nous n'étions pas, avant d'être dans une crise de survie et de détresse économique, surtout dans la prolongation de la crise d'identité nationale d'après-guerre et dans l'abandon de notre liberté intellectuelle.
Alors, ce journaliste, puisque ce sont depuis longtemps les médias et leurs commentateurs qui font la pluie et le beau temps de ce qui nous paraît être "notre" vérité, le même qui a dû, on imagine hurler contre les Russes et les non-vaccinés mais dont personne ne se rappelle les compromissions à l'intelligence critique, il dit : " Si on est là, c'est de leur faute"
Et ce que ça dit, la vérité est toujours dans les soutes du lapsus, c'est que la question n'est pas simplement une haine intergénérationnelle, cultivée, assaisonnée avec méthode par tous ceux qui ne disent pas que l'objectif est le changement de régime, le passage à la capitalisation, non parce que c'est une façon plus "respectueuse" de gérer les retraites mais parce que c'est la seule voie libérale envisagée par ceux qui nous guident, ni que la catastrophe est d'abord due à une désindutrialisation massive, à une politique antinataliste radicale, à une dépendance à l'UE et certes pas à une affaire d'"égoïstes", comme si une génération entière, pouvait, à elle seule, porter tous les maux de la terre.
Donc, ce que ce lapsus dit, c'est que l'après-révolution des années 80, la révolution néolibérale et globaliste a amené surtout une crise profonde existentielle.
Pas économique, et que la génération des "boomers" était plus armée que celle qui l'a suivie pour y répondre.
Cette révolution néolibérale des années 80 et des Chicago boys, autour de la globalisation et du libre marché ouvert sur le monde, l'imposition d'une vision de l'humain pris dans les rets d'une culture mythico-scientiste imposée.
Elle a été celle du martelage de la biopsychiatrie qui a transformé tout questionnement sur l'Etre en nécessité de diagnostic, amené aussi des fabulations progressistes à devenir loi au prix d'un véritable massacre de milliers d'adolescents, a amené à croire que des critères naturels, peau, sexe, âge, pouvaient être des outils de mesure de la valeur de l'individu en soi, a amené la réforme de l'enseignement avec son illusion de "l'enfant au centre du système éducatif" et l'éducation positive comme mantras,
Tout ce balayage venu, là aussi des USA et des fils et filles du behaviorisme bien décidés à reprendre la main idéologique, surtout, et pour cause, en France, après des années de psychanalyse, et relégant cette dernière dans les soutes de l'obsolescence, avec les dangers du retour du refoulé qui s'opère quand on veut prétendre ne PAS être l'inconscient qui nous mène mais dépendre d'un hypothétique "cerveau" où s'originerait toute l'affaire.
Cette haine boomeresque est une des multiples manifestations de ce refoulé qui revient, toujours d'une façon dévastatrice, quand on veut l'oublier.
Il s'agit de tuer le père, encore et toujours, de se dire "venu" de nulle part, autocréé et détenteur d'une sorte de vérité déjà là en soi que la "société" aurait méconnue, comme le récite le culte trans.
Evidemment cela échoue, cela ne peut qu'échouer et quand c'est cumulé avec des spectacles incestueux et des doutes sur la possibilité de mensonges sur des faits essentiels, au plus haut niveau des édiles, ça rend fou.
Ce que l'individu étatisé qui nous a enfouis, tous, sous le sable, nous montre, c'est que cette éventualité d'une ascension sans Loi, sans cadre, et donc sans Autre mène au désastre alors que le politique, justement, est la seule chose qui nous en préserve.
Le discours sur les boomers est huilé, et là comme pour l'apologie du transgenrisme, on constate que chaque commentaire utilise exactement la même terminologie, au mot près, ce qui indique une infiltration en amont qui prépare le terrain des mentalités à accepter ce pogrom générationnel comme "la" vérité puisque c'est par imprégnation et mimétisme que pense la masse.
On y entend, en substance, le même "sauver des vies" qu'il y a quelques temps.
Au fond, le reproche majeur fait à cette génération, "génération" d'ailleurs qui est une qualification tout à fait douteuse, c'est d'avoir JOUI.
Evidemment que la jouissance, réelle ou fantasmée, est insupportable chez l'autre, quand c'est ce qu'on vous fait miroiter depuis des dizaines d'années , quand on vous laisse entendre que le "progrès" est aussi un progrés vers le "bonheur" et que votre seule occupation serait de maitriser chaque frustration, chaque moment de souffrance, chaque "inconfort" en l'éradiquant définitivement, et quand, devenu "adulte", (pour autant que ce soit encore un temps de l'existence dans cette culture qui ne chérit que les élans passionnés et primaires de l'adolescence et espère y rester ancrée à jamais en immobilisant ses goûts et ses élans esthétiques pour toujours dans les choix des motifs des tatouages qu'elle se fixe à vie sur la peau), on s'aperçoit que c'était un leurre, un leurre total et qu'au fond, tout de votre route existentielle et de votre subjectivité s'est englouti dans ce leurre, au point que votre propre vie ne puisse plus être qu'une question, grande ouverte, à laquelle vous souhaitez que vos pères répondent , en répondent, en les accusant de vous avoir fait naître.
Un autre élément qui fait retour, c'est la dette, qui, quoi qu'on en veuille est ce qui reste du fait de devoir la vie à qui que ce soit, comme une façon de s'inscrire dans un déjà-là de la lignée, du passé, de l'histoire, que l'idéologie progressiste actuelle voudrait pouvoir éradiquer, mais qui est ce qui vous dit et vous porte, que vous le vouliez ou non, que vous aspiriez à l'euthanasier ou non.
Il est d'ailleurs assez troublant que ce soit autour d'une sorte d'abysse de la dette que cet élan eugénique s'éveille.EG