France’s gerontocratic nightmare
Regardless of who wins, the elderly will rule
BY EMMANUEL TODD
Avec tout le respect que l'on doit aux signes d'érudition et à la maîtrise des sujets qu'on rend publics, le tour que prend cet appel réitéré de Todd à la stigmatisation des "vieux" nous laisse perplexe.
Statistiques, diagrammes, porteurs des rigueurs de la vérité, bien sûr. Mais cet usage qui a été fait à plusieurs reprises des incidences médiatiques de ces analyses, univoques et complètement aguicheuses, demande à prendre quelque recul. Quand le Parisien, corde vocale de la Voix de son maître, récupère ce qui avait dans un premier temps semblé une remarque au second degré et prône l'interdiction de voter des plus de 65 ans, quand le titre s'étale avec tous les artifices du modèle communiquant, donnant au terme "cauchemar" son poids de frisson, on dépasse le champ de la rationalité et de l'analyse pour joindre celui si pratiqué en nos temps de décomposition intellectuelle, de stigmatisation avec tous les dangers associés.
On peut d'autre part faire l'hypothèse que contrairement à ce que le titre si racoleur laisserait croire, cette tranche de l'électorat est plus manipulée par la propagande que manipulatrice.
Ce qu'Emmanuel ne semble pas concevoir, c'est que le fait de réduire les choix électoraux à une interprétation naturaliste alimente comme si besoin était , les déjà bien vicieuses et omniprésentes attaques contre "les boomers", devenus, par manipulation d'opinion et simple ignorance ou bêtise congénitale, porteurs de tous les maux : égoïstes, nantis, responsables du changement climatique et du pillage des ressources et désignés comme les boucs émissaires porteurs de la décadence postmoderne.
Le mouvement sous-jacent, tout à fait dépendant des thématiques progressistes est celui qui ramène toute interaction à la "preuve" portant sur des critères naturalistes, âge ici mais aussi sexe, race, qui auraient "en soi" pouvoir de validation d'une vérité. Ceci est d'autant plus ironique que dans une publication sur son dernier livre traitant du néoféminisme, Todd lui-même s'est vu relégué et a vu surtout reléguer son analyse au gâtisme dans certains commentaires et au machisme patriarcal dans d'autres.
Le rapport à l'âge et son imparable lien à la mort et à la liberté biologique toute-puissante du corps est un des points sensibles de la reconstruction idéologique de la quatrième révolution, et, on comprend hélas pourquoi les "propos" haineux le concernant ne font pas l'objet d'une censure aussi zélée que les divers bannissements touchant le sexe ou la race quand on sait qu'Attali lui-même, Grand Manitou de l'homme augmenté, déclare qu'un individu de plus de 65 ans est un fardeau pour la société, devenu incapable de lui apporter l'énergie dont elle a besoin. Oh cynisme ! Il suffit de regarder Soros ou les frères Koch, entre autres décrépis totaux, pour voir à quel point son analyse est juste.
On peut arguer que le choix des urnes n'est pas uniquement funéraire et a peu à voir avec ces questions de révolution anthropologique, on se trompe. Et il est fâcheux que Todd joue cette carte de la catégorisation morbide sans en mesurer les conséquences dans la construction des mentalités sur le moyen terme du projet eugénique et sur la création de fractures sociales dévastatrices. EG
